Voyager en Inde, c’est tout sauf des vacances.
L’inde est un pays stressant, et pour plusieurs raisons : les villes sont bondées, le bruit est omniprésent, la misère banale et les chocs permanents. L’inde c’est un roller coaster de sensations mon pote, et autant le dire tout de suite, quel que soit le nombre de pays que t’as déjà visité, t’es pas prêt. Pas prêt du tout.
Bombay & Goa
L’Inde c’est magnifique, puissant, ça prend aux tripes. La jungle d’Hampi, les canaux d’Alleppey, les plages de Goa sont des endroits magiques qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. Et puis, surtout, il y a les gens, les saris multicolores, la chaleur des habitants, la ferveur, l’encens, les épices, les pigments de couleurs qui volent pendant le Holi… Si l’on est un peu méfiant au début, ces craintes s’évaporent naturellement au bout de quelques jours au contact de la bienveillance des indiens. Ils sont aimables, souriants et toujours prêts à aider. Jettes tes idées préconçues sur les indiens, ça ne correspond pas à l’immense majorité des gens de ce pays. L’inde réveille en vous des sentiments puissants : l’émerveillement, la tolérance, la bienveillance, le respect, l’humilité, la colère parfois.
Hampi
Vous ne pouvez pas visiter l’Inde comme vous visitez l’Islande, en profitant des cascades sans rien voir d’autre ni personne aux alentours. L’Inde, vous plongez dedans, vous ne pouvez y échapper nulle part et c’est ça qu’on aime ou qu’on déteste. C’est un pays tellement varié, riche en sensations, on y côtoie tous les jours le pire et le meilleur, l’inde émerveille et dégoute tout à la fois. Des splendeurs et de la poussière, des oiseaux et des klaxons, des temples majestueux et des gosses pieds-nus qui vendent des merdes à 30 centimes, l’Inde est le reflet du monde, le reflet de la vie. Rien n’est tout blanc ou tout noir, les deux se mélangent partout et tout le temps, et il ne reste que des nuances. Et c’est à vous de choisir ce que vous voulez y voir.
Munnar
Nous étions perdus dans les champs de thé après avoir pris un petit chemin au pif à côté de la route. On découvrait, émerveillés, Munnar et ses collines parsemées de plantations de thé vert quand nous les avons aperçues de loin, ces petites cueilleuses de thé. Ne voulant pas les déranger, nous avons commencé à prendre des photos d’où nous étions. Et puis, cette femme s’est mise à poser. Genre vraiment taper la pose, au milieu des champs de thé. Encouragés par son sourire, nous nous sommes rapprochés, et rapprochés encore. Elles étaient trois. Nous ne parlions pas leur langue, elles ne parlaient pas la notre, mais nous sommes restés là, tous les cinq, pendant à un bon quart d’heure à essayer de nous raconter des trucs sans nous comprendre.
Elles nous ont montré comment cueillir le thé, quelles feuilles choisir, et pourquoi elles portaient ces étranges matelas à la ceinture pour se protéger des branches.
Alors, la prochaine fois que vous vous faites une tasse de thé chez vous, n’oubliez pas son visage, n’oubliez pas ses mains, et rappelez-vous que votre tasse est remplie d’amour.
Une idée derrière la tete
Le soleil commençait à décliner, il était temps de quitter les jolies collines de Munnar.
Sur le chemin du retour, nous avons croisé cette jeune fille avec son paquet de branches sur la tête. Sans hésitation, elle nous balance avec un grand sourire : « follow me ». On se regarde, on sourit, et on décide de la suivre.
Vingt minutes plus tard, on arrive dans un tout petit village au pied des collines, et on passe la porte de sa petite maison. Là, nous rencontrons sa mère, ses frères et sœurs, sa tante, son oncle et leurs enfants. Ils vivaient tous là. On nous installe sur le canapé, les hôtes tous en face de nous, et on se regarde en riant sans trop comprendre ce qu’on peut bien faire ici. Et puis, la conversation est partie dans une joyeuse pagaille.
On nous a parlé du grand frère star nationale de cricket, on nous a montré les photos du père qui posait fièrement avec les touristes dont il avait réparé la bécane, on a discuté un bon moment dans la joie et la bonne humeur. On dit que le Kerala est une des régions les plus hospitalières d’Inde, et c’est mérité.
Tamil Nadu
Le lendemain, après un concours de circonstances, on se retrouve embarqué dans un trek de trois jours dans les montagnes entre le Kerala et le Tamil Nadu.
Voici un jeune homme qui habite dans un village perdu au pied d’une montagne, un village qui n’a pas d’électricité, un village dont je ne connais pas le nom, dont pas grand monde ne doit connaître le nom. On était là, avec notre guide, dans son village natal qu’il voulait nous montrer. Il voulait qu’on rencontre sa famille, il voulait nous raconter son histoire.
Ce gamin-là, avec sa chèvre, il m’a donné son lit pour une nuit. Qui ferait ça à Paris ? Personne, et surtout pas moi. J’ai eu honte. Putain. J’ai eu honte de mener cette vie. J’ai eu honte de vivre dans autant de confort. J’ai eu honte de toujours trouver une raison de râler. J’ai eu honte d’être aveugle. J’ai eu honte du métier que je fais et de la futilité de ce qu’il représente. J’ai eu honte de faire du tourisme en Inde.
Alleppey & Kochi
Un dernier tour de bateau avant de rentrer chez moi.
Bienvenue dans la venise de l’Inde !
Un petit conseil : si vous voulez aller en Inde, commencez par le Sud. Des villes moins bondées et des paysages magnifiques, c’est tout bon !
Mais quoi qu’il se passe, vous ne vivrez plus jamais dans un monde de bisounours.